Helia an 598 AUC (convertir une date)
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Version (ID) : 6970
Date : Frodea an 250 AUC
Titre : Chapitre 10: Aéyédine
Contenu :
Chapitre 10
Aéyédine
Aoulguie s'approcha de la licorne et déclara :
- Si tu veux accélérer le réveil de la jeune Serinoë, il va me falloir un peu de poudres de ta corne. Puis-je la limer un peu ?
Mériade resta silencieuse quelques instants, jaugea du regard la vieille dame qui, avec ses vêtements de peaux de bête, son collier fait de petits os, avait l'air d'une veille sotte, ayant perdu la tête, plutôt que d'une guérisseuse.
- Que vas-tu faire avec la poudre de licorne ?
- Tu le sais très bien licorne. Qui a pratiqué la transformation ? Elle sait ?
- Non, et ne va pas lui dire!! S'écria Mériade. Qui es-tu donc vieille femme ?
- Où est sa mère ?
- Morte en lui donnant naissance.
- Hum ! La candidate idéale. Je sais plus de choses que tu ne peux l'imaginer. Je ne vois que deux sorciers capables de le faire : le Maître de l'Ombre, mais il me semble qu'il est à votre poursuite, et Kentnys, le vieux brigand !
La licorne fit mine de ne rien comprendre. Voyant son obstination à se taire, Aoulguie n'eut pas le choix. La métamorphose se produisit, dans la lueur pâle de la lune, le visage ridé devint lisse, le dos courbé s'étira, la chevelure grise prit une couleur brune. Aoulguie la vieille guérisseuse était de nouveau l'altière magicienne Aéyédine. Un véritable enchantement !
La licorne s'était reculée de plusieurs pas, elle s'approcha de nouveau de la jeune femme à petits pas et baissa la tête comme pour lui toucher les pieds.
- Oh ! Vénérable Aéyédine, tu es en vie ? Nous te pensions perdue.
- C'est une longue histoire et c'est ce que je désirai. Me croire perdue m'a rendu un fier service.
Aéyédine voulut savoir pourquoi une telle décision avait été prise et elle attendait de la licorne une franchise sans détour. Mériade lui parla de la prophétie et du Rassemblement. Trois jeunes filles en plus de Sérinoë allaient devoir quitter cette terre afin d'en conquérir une autre pour y établir un Renouveau. Profitant du sommeil de Kentnys , le maître de l'Ombre avait brisé l'équilibre des magies, qui régnait depuis des temps ancestraux, afin d'assouvir une soif de pouvoir qui lui enlevait tout discernement. Il avait transformé plus de la moitié du territoire en un cloaque où vivaient des bêtes immondes et meurtrières. A son reveil, Kentnys n'était pas parvenu à rétablir l'équilibre suffisamment vite. Alors, il était venu voir le troupeau et leur avait donner les directives à suivre pour qu'au moins leur race soit sauvée. Les licornes devaient survivre, c'était impératif.
- Le brigand veut surtout sauver sa peau, commenta la magicienne. Il sacrifie trois jeunes filles. D'où vient cette prophétie à ton avis ?
- Il te croyait perdu lui aussi!
- Ah! La belle histoire. Comment crois-tu que je sois devenu Aoulguie? Il faut être deux pour réussir une transformation. Tu devines qui m'a aidé? Que cherche l'Ancien?
Soudain, comme si un insecte l'avait piquée, Aéyédine tourna en rond levant les bras au ciel et vociféra :
- Comment avez-vous pu céder à ce caprice de vieux fou ?
- Je te le répète Mère Aéyédine, nous te croyions perdue. Mériade gardait la tête baissée.
- Arrête avec ça ! Dit-elle d'un ton cinglant en apercevant Luciléa.
Luciléa se tenait sur le pas de la porte :
- Que se passe-t-il ici ? Pourquoi ces cris ? Où est Aoulguie ? Qu'en avez-vous fait ?
- La petite a du cran. C'est très intéressant, minauda Aéyédine.
Elle se planta devant Luciléa et lui demanda depuis combien de temps elle était là à espionner.
- Je n'espionnais personne. Les cris m'ont réveillée et j'ai cru un instant que nous étions attaquées. Mais qui êtes-vous à la fin ?
- Je suis Aéyédine.
- Aéyédine la Mère des forêts et des prairies, la protectrice des licornes ? La jeune fille s'inclina, pardon Mère Aéyédine ! Elle se releva et demanda prudemment :
- Où est Aoulguie ?
Aéyédine se retourna et lui lança comme une gifle :
- Aoulguie, c'était moi ! Obstinée avec ça, dit-elle en lui posant un doigt sur le menton.
Luciléa ne comprenait plus rien et chercha du regard l'approbation de Mériade, lorsqu'un hurlement se fit entendre.
Mériade eut l'air terrifié :
- Des loups ! Cria-t-elle, ce sont eux qui ont décimé notre troupeau.
Bien sûr les loups, pensa Aéyédine, le Maître de l'Ombre se servait des loups, il les avait lancés à leur poursuite. Luciléa savait ce que cela voulait dire, le danger se rapprocherait un peu plus chaque jour, la traque pouvait durer des jours et les loups ne lâcheraient pas prise.
Aéyédine commençait à se calmer.
- Nous avons un problème de taille. En reprenant ma forme de magicienne, le Maître de l'Ombre m'a sûrement localisée. Il vaut mieux organiser notre départ. Nous devons nous occuper de Serinoë qui nous sera de toute façon très utile. Depuis combien de temps est-elle dans cet état ?
- Depuis deux jours, nous avons été poursuivies par des oiseaux de l'Ombre. C'est Luciléa qui nous a sauvées. Sérinoë a tenter de nous protéger avec une cape de brouillard mais elle ne le maitrise pas encore, puis elle a lancé un charme sur la forêt, les arbres lui ont obéi. Elle s'est hélas écroulée dès notre arrivée à l'abri. Le charme prenant fin, Luciléa nous a parlé de la cabane d'Och et nous sommes venues vers toi, expliqua la licorne avec révérence.
- Hum ! Allons-y, approche licorne, tu ne sentiras rien et elle va repousser ta fichue corne.
Aéyédine lima la corne de licorne. Elle ajouta une potion à la poudre recueillie, qu'elle donna à Serinoë. Quelques minutes plus tard, la jeune fille se réveilla.
- Où suis-je ?
- Chez une amie, la rassura Luciléa, mais nous allons devoir partir bientôt. Dors encore un peu.
La jeune fille sombra de nouveau dans le sommeil.
À l'aube, la troupe se remit en route, mais avec une invitée de taille : Aéyédine avait décidé de les accompagner jusqu'au point de rassemblement. Elle avait en chemin des choses à apprendre concernant les pouvoirs de la jeune Serinoë et surtout elle avait hâte d'avoir une petite conversation avec Kentnys qui avait pris des libertés à la limite de ses droits et devoirs de sorcier. Elle était la seule Gardienne du troupeau. Puis il y avait les loups, Aéyédine pourrait les tenir à distance pendant un moment, si elles voulaient toutes avoir une chance de survivre à ces monstres immondes.
Elle était très en colère d'avoir perdu sa couverture d'Aoulguie, elle avait quitté le monde de la magie lasse et déçue et elle ne se doutait pas qu'elle allait devoir le retrouver aussi tôt. La petite colonne avançait en silence lorsqu'elles entendirent une explosion et en se retournant aperçurent de la fumée à l'emplacement de la cabane d'Och.
Un avertissement du Maître de l'Ombre.