Evolutia

[Alewyr]

Il est vrai que t'égaler je n'y arrive pas. Je ne pourrais jamais baisser le niveaux de mes compétences au tien ^^. Je suis bien au dessus.

Ah ... Quand j'y pense, tu me bas peut être dans un domaine. Oui, celui de ne rien faire ^^.

Allez vient tenir le clou au lieu de dire n'importe quoi.

[Evolutia]

J'écoute attentivement les réponses de notre, Édile. Puis je m'amuse à observer comment lui et Alewyr passent leur temps à se tirer l'oreille. À les entendre se relancer, avec chacun leur sens de la répartie bien campé, je crois comprendre qu'ils ont pris l'habitude de se haranguer.

Ils commencent tout de même à s'affairer autour des planches et des outils. Pendant ce temps, je prends le panier contenant les couverts ainsi que le repas que "6ui..." Arcano?... Édile, m'a remis. Je dépose le steack emballé au coeur d'une touffe de mousse fraîche, à l'ombre et à côté un tonnelet de cervoise. Je vais ensuite voir aux alentours afin de trouver du bois sec et reviens préparer une aire de feu. Je vais m'occuper de la cuisson de la viande, veiller à ce que le repas soit prêt à temps pour le moment de la pause.

Lorsque tout est préparé à ma satisfaction je me verse un bonne cervoise.

Et pour vous messieurs? Je vous sers un bon boire?

Je projette également d'aller me ballader dans les environs, je veux me familiariser avec les chemins et le paysage de mon nouveau patelin

[Evolutia]

Je reviens de ma promenade, les hommes avancent bien avec les travaux. Je prépare le repas comme prévu et nous mangeons ensemble avec joie. Après, je mets aussi la main à la tâche et les aide à terminer la construction. L'édile tient compte de mes besoins, il a fait savoir au bureau d'aide aux nouveaux arrivants et il m'a fait livrer une petite table en bois, deux chaises et une paillase en toile de chanvre remplie de foin de seigle, une couverture en laine. Le jour décline, mes amis vont bientôt devoir retourner chez-eux. Je sers ce qui reste de cervoise avant de les laisser partir, leur faisant promettre qu'ils reviendront me rendre visite aussi souvent que possible. Je me prépare et bois un bon thé puis me mets au lit.

J'ai mon petit nid bien à moi dans lequel je vais passer une première nuit.


ZZZzzzzzzzzzzz ...!!!... ZZZzzzzzzzzzzz ...???...


Je suis à Lapiaz, j'ai loué une barque, une commande spéciale, j'y ai fait installer un filet protecteur monté sur un bâti fixé à l'embarcation. Une précaution devant servir de protection. C'est que j'ai décidé d'aller dans les marais salants, à moustiques, de "lagonie". Pourquoi?... - Je me rends à son embouchure et m'avance sur la pièce d'eau en ramant précautionneusement parmi les joncs. Il flotte une odeur poisseuse de bestioles aquatiques. J'ai apporté un peu de nourriture, des pains, de la compote de pommes, un petit fût de cervoise, J'ai aussi un filet à pêche et une hache. J'ai déposé le tout sur le plancher... "Les dernières possessions qui me restaient" ... Heu???... - Je suis recouverte de plusieurs pelures de vêtements dont une plus étoffée par-dessus les autres, du genre de celles que l'on porte lorsqu'il fait froid... "J'ai froid?... Je ne comprend pas..." - il fait beau et chaud. Ensuite, je prends le filet d'une main et de l'autre je soulève un peu la moustiquaire entourant ma nacelle. "Qu'est-ce que j'essaie de faire?... Quelle tâche ardue, je m'y prend mal!..." - Je me penche en avant pour essayer de mettre le grément à l'eau. Je ne me suis pas rendu compte que je porte plusieurs bijoux de toutes sortes... Inconsciente du fait que ma position devient précaire, je ne vois pas que le rebord de la barque frôle dangereusement la surface des flots. Le filet qui est lourd commence à se dérouler et se met à descendre avec une rapidité surprenante. Soudainement une secousse renverse ma coque, en un éclair je passe par-dessus bord! Je lâche prise, mais alourdie par le surplus de vêtements et tous les colliers autour de mon cou, je coule vers le fond, impuissante...

Puis c'est le trou noir! Et le scénario change...

Me voilà dans une grande bâtisse à l'atmosphère plutôt lugubre. Des personnes à l'air étrange et au comportement bizarre déambulent dans de larges et longs corridors mal éclairés. J'arrêtte une femme à la chevelure ébourriffée, le visage barré d'un rictus inquiétant, et lui demande :

Quel est cet endroit? ... Où je suis là ?

Elle éclate d'un rire sardonique et me dis :

Tu parles! Tout le monde sait où l'on est ici! À l'asile de Lapiaz!

Les autres s'approchent en rigolant et se mettent à clâmer d'une voix chantante et traînarde :

Mais oui! Et qu'est-ce qu'on se marre! Viens t'amuser avec nous!

L'asile!!!???... Je m'éveille en sursaut en entendant un grand cri. Je m'aperçois, confuse, que c'est moi. Assise sur ma couche, j'ai hurlé de peur et suis recouverte de sueurs froides... (Quel cauchemar!... Mais qu'est-ce que c'est que ce mauvais rêve?...)

Je ressens l'inconfortable impression qu'il y a un sens à donner à cette vision onirique déconcertante.

Les images sont encore fraîches à mon esprit, je les passe en revue en tâchant de réfléchir. Pas moyen de trouver un dénominateur commun, un raisonnement plausible à ces scénarios... Revoilà cette foutue migraine... Je sors de ma paillasse et me prépare du café. Je mange un bout de pain et du fromage. Je dois me rendre au port, sauter dans une barque, aller à la pêche. Le grand air marin me fera le plus grand bien. Je prendrai du temps pour essayer de repenser à ces "messages" sortant de mon inconscient à un autre moment.

[Evolutia]

Je m'intéresse à cet endroit dans lequel je me retrouve, sans savoir...

J'ai donc décidé de passer une partie de mes temps libres en recherches et explorations.

Je veux en apprendre autant que possible au sujet de ce pays appelé territoire de Kiponie et sur cette cité de Lapiaz, en train de devenir ma patrie. Je consulte régulièrement le manuscrit de la Licorne et les archives de la bibliothèque edilique, ici, sur la Place Publique. J'ai parcouru les parchemins relatant les évènements, les faits connus datant d'avant et les plus récents. J'ai aussi consulté les anciens écrits dans lesquels il est fait mention de contes et légendes non documentés, fouilles archéologiques incomplètes. Je vais aller m'aventurer sur le terrain, m'approcher des mystères non résolus, aller à la découverte de ce que je pourrai trouver. Voilà qui me fera un bon passe temps et je pourrai partager le fruit de mes découvertes.

... Lorsque je suis arrivée à Lapiaz je n'ai rien laissé paraître, mais je me sentais inquiète, apeurée, en constatant être atteinte d'une amnésie incompréhensible. J'ai été prise en charge d'une façon naturelle par des gens me paraissant habitués à voir venir vers eux des personnes perdues et désorientées. Je me suis laissée accueillir et guider sans parler de ce qui m'arrive, que je ne comprends pas. Sauf, j'en ai touché un simple mot à mon nouvel ami Alewyr qui, voulant se faire rassurant, m'a suggéré de ne pas m'en faire. J'ai entendu parler de naufragés en mer, échoués sur les diverses plages entourant Kiponie. Moi, j'étais sur le dos, sur la terre sèche, au milieu d'une prairie en banlieue de la cité...???... L'anxiété et la peur me reprennent par moments, lorsque je suis dans des états méditatifs, dans mon sommeil... Pourrai-je un jour reconstituer les faits? Recoller les morceaux de mon histoire? Me retrouver...

[Alewyr]

N'étant pas venu sur la place publique depuis plusieurs kipo-mois par manque de temps, Alewyr s'y rendit dès qu'il le put. Faisant le tour, il remarqua Evo' assise dans un coin, en train de lire un énorme volume qu'elle avait disposé sur ses genoux de sorte qu'il ne tombe pas pendant qu'elle mangeait plusieurs petits gâteaux ronds et noir. Curieux de savoir ce que pouvait être ces biscuits, Alewyr s'avance jusqu'à la jeune Lapiazote.

Salut Evo' ! Comment vas-tu ? Te plais-tu donc dans la charmante cité qu'est Lapiaz ?

Oh mais qu'est ce que c'est que ce gros bouquin ?

Si tu aimes lire, j'ai quelques livres chez que j'ai lu il y a bien longtemps. Il y en avait un c'était ... Euh ... "Etude du wapiti en milieu humide" je crois ... Oui c'est ca ... Ah mais ... Oh, non, il a finit à la mer durant la construction du phare si je me souviens bien. Sinon, j'ai également "L'oidi le manchot", ça raconte l'histoire de ... L'histoire de quoi déjà ? Ca fait vraiment longtemps que je les ais lu ces bouquins !

[Evolutia]

Tiens bonjour Alewyr!

Je vais bien et toi?

Je me plais bien à Lapiaz, de mieux en mieux et j'aspire à découvrir certains de ses mystères. De là toute cette littérature pour tâcher de trouver des pistes pouvant m'aider dans mes recherches. Ça m'intéresse d'essayer de rétablir une partie du patrimoine de ma cité d'adoption. Je suis allée explorer au port, voir si je pourrais trouver des personnes au fait des légendes d'ici. Le rédacteur de notre journal a publié le récit de mon aventure. Quant aux biscuits, ce sont de petites galettes énergisantes au lichen. Ça s'appelle : "ongles de sorcières"

Comme je me suis sentie heureuse de voir ainsi Alewyr venir à ma rencontre. Sa gentillesse fait chaud au coeur et sa façon bien ingénue d'être un peu brouillon le rend charmant. il est soucieux du bien-être de ceux qui l'entourent et prêt à rendre service autant que possible.

J'espère que nous resterons amis.

[Evolutia]

Mon bon Alewyr m'a aidée à me familiariser avec l'agence à l'emploi, en m'engageant à sa charpenterie. Je suis allée plusieurs fois à la pêche pour sortir du poisson du fleuve et le mettre en vente au marché. J'ai été passablement surprise de me sentir à l'aise à manoeuvrer une barque et à manier le filet de pêche. Je fais présentement un stage dans une fromagerie. J'ai besoin de diplômes et de gagner les kipons nécessaires à me lancer en entreprises pour arriver à prospérer en ce pays.

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Quelque temps plus tard...

Tout ce travail demande un effort considérable.
Ce soir, je rentre chez-moi complètement fourbue. Je me sens très fatiguée, je me laisse tomber sur ma paillasse ...

Je me sens étourdie, j'ai la nausée... J'ouvre les yeux...

Sous une pluie fine je me tiens debout, trempée, devant la grille de ce qui semble être un vaste domaine dans un secteur boisé. J'appelle à l'aide :

Au secours! Aidez-moi! Je vous en prie, Y a quelqu'un?... Venez m'ouvrir! Au secours!...

Un petit homme trapu apparaît, un râteau à la main. Il me regarde, à travers les barreaux de la grande porte de fer, me fixe sans dire un mot.

Aidez-moi monsieur, s'il vous plaît, je suis perdue, j'ai froid, j'ai peur...

Il sort une grosse clé de sa poche, attachée par une corde à un grand anneau de fer inséré dans sa ceinture. La serrure du portail grince lorsqu'il y fait tourner la clé. Toujours sans ouvrir la bouche, il me fait signe d'entrer et de le suivre. Nous marchons vers la grande bâtisse érigée au fond du terrain. Je ne dis rien, je tapote mes bras croisés avec mes mains. J'ai hâte d'entrer à l'abri. L'homme aussi reste silencieux. Arrivés au vieux porche décrépi, nous montons quelques marches au marbre craquelé enchâssé dans la pierre. Il se sert de la même clé pour ouvrir la grande porte de bois lambrissée se dressant devant nous. Nous pénétrons dans le hall d'entrée. Il prend alors une clochette, posée sur une rotonde à l'entrée et sonne doucement. Nous attendons.

Une porte s'ouvre, quelque part plus loin dans un couloir. Je vois une femme de taille moyenne arborant un joli visage, encerclé par une abondante et longue chevelure, venir à notre rencontre d'un pas sûr en souriant gentiment. En la voyant de près, je lui trouve un air un peu las. Elle a pourtant conservé des traits de jeunesse, même que sa main fine tendue vers moi trahit son âge respectable. Elle prend doucement mes mains dans les siennes et se présente :

Je suis la Grand Dame Isabeau de Cendre, gardienne de ce lieu. Merci Séverin, vous pouvez retourner à vos occupations.

Le petit homme, Séverin, la regarde avec une tendre admiration. Il la salue respectueusement en se courbant, me fait un signe de la tête et retourne vers la sortie. Aussitôt que la porte se referme derrière lui, j'entends le penne du verrou claquer... Je me retourne et fixe la seule sortie à ma portée, maintenant sans issue... Dame Isabeau ramène mon attention à elle :

Voyez-moi ça... Comme vous êtes mouillée... Tous ces vêtements que vous portez par couches successives doivent vous peser lourd sur le dos? D'où arrivez-vous ainsi? Que vous est-il donc arrivé?

Je reste là, bouche bée... Pendant un moment je cherche quoi répondre.

Je... Je ne sais pas... Je me suis retrouvée ici au milieu de nulle part, devant la grille... Je dormais, chez-moi, sur ma couche et...

Allons bon, ne vous troublez pas ainsi ça ne donnera rien de bon. Venez avec moi, commençons par vous redonner un brin de confort. Vous allez prendre un bon bain chaud et je vais vous trouver des vêtements de rechange. Lorsque vous serez prête, nous pourrons reparler de tout ça devant une bonne tisane, près de la cheminée. "Vous pourrez rester ici le temps qu'il faudra"...

J'ai vraiment besoin de me laver et de m'habiller convenablement, je la suis dans le grand vestibule. Nous tournons à droite et une plaque dorée sur le mur suivant attire mon attention. Dessus il est écrit, en lettres noires incrustées : "Asile Pshychiâtrique de Kiponie"...

*AHHHhhhh!!!!*... Satané cauchemars!

Mais ça paraissait si réel... Je...???... Je l'ai vécu, ça m'est arrivé pour de vrai... Oye! ma tête...

Je sors prendre un bouffée d'air...

[Evolutia]

-
J'émerge... Encore une fois... réalité?... Rêve?... Je ne sais pas... Je n'ai plus mal à la tête...

J'ouvre lentement les yeux, je me sens étourdie, faible.

Une fraîcheur se pose sur mon front. Ça fait du bien. Je lève ma main, mon bras, je les dirige à tâtons et je touche, un chiffon mouillé, des doigts, je tourne lentement la tête en direction de l'avant bras sur lequel je viens de prendre prise. Et mes yeux rencontrent ceux de, Dame Isabeau!...

- Mais, je, qu'est-ce...

- Là, allons, restez tranquille, soyez sans crainte, vous êtes en sécurité ici.

- Le, l'asile, vous... le seul endroit où je vous ai vue, l'asile!

- Voilà qui est bon signe, vous vous souvenez de moi. Oui, vous êtes à l'asile, à l'infirmerie, rebienvenue dans le monde des vivants. Prenez le temps de vous éveiller et vous avez besoin de reprendre des forces. Je vais vous faire préparer un bon bol de soupe à l'orge et quand je reviendrai vous aider à manger, nous pourrons parler un peu de ce qui vous arrive.

Isabeau m'aide gentiment à me redresser sur des traversins faits de chanvre cardé et rembourrés de foin. Ça sent bon cette arôme de savon lessive se mariant à l'odeur végétale. Elle pose des gestes en douceur, presque avec tendresse et à la fois d'une fermeté rassurante. Je me sens étrangement confiante envers elle. Elle me tend un verre d'eau fraîche. Je bois en me délectant à petites gorgées.

- Vous avez meilleure mine, je reviens tout de suite.

Je suis à l'asile, à l'infirmerie...???... Qu'est-ce que je fais ici? Qui je suis ?!... Mais, voyons!

Je suis, Evolutia! Oui! Je suis déjà venue ici. Oui? Non?... Oui, la réponse est oui.

La dame revient avec le bol de soupe. Le chaud fumet se faufilant à mes narines sent encore plus bon que mes oreillers. J'ai faim! On dirait que ça fait, trop longtemps, que je n'ai pas mangé. J'avale volontiers ce bon bouillon que "ma soignante" m'aide à ingurgiter. Elle voit bien que je la questionne du regard.

- Bon d'accord, je vais tâcher de vous dire ce qui en est le plus clairement possible. Vous pourrez me poser les questions qui vous viennent à l'esprit et j'essaierai d'y répondre au mieux de ma connaissance. Vous êtes arrivée ici il y a quatre jours maintenant, nous sommes dans la matinée du quatrième jour.

Vous êtes venue marteler à la porte, Séverin a du courir derrière vous pour venir ouvrir, cette fois. Vous étiez en proie à des délires, vous vous teniez la tête à deux mains de douleur. Puis vous vous êtes soudainement évanouie. Nous vous avons transportée ici à l'infirmerie et vous êtes restée inconsciente sur cette couche tout ce temps. J'ai réussi à vous faire prendre de l'eau tiède additionnée de potion fortifiante chaque jour, mais je ne vous cacherai pas mon inquiétude à penser que vous ne pourriez pas rester trop longtemps sans manger. Je commençais à avoir peur que nous ayons à craindre pour votre vie. Je me sens vraiment soulagée de vous voir assise en train de vous nourrir enfin.

J'ai écouté tout ce qu'elle vient de me raconter attentivement et je tente de réfléchir en silence.

Douleur, mal de tête... Tiens c'est vrai ça, je me sens mieux, je n'ai plus mal à la tête! Mal... migraine, délires, non visions? Non... Cauchemars! les cauchemars, l'asile?... Puis des paroles qu'elles a prononcées s'imposent à mon esprit, comme si j'entendais un écho. Cette fois... cet... Cette fois ?!...

- Vous avez bien dit :

"Séverin a du courir derrière vous pour venir ouvrir, cette fois." ?

- Effectivement, vous étiez de retour cette fois-ci. Vous êtes déjà venue par le passé demander secours, nous vous avons accueillie et vous avez séjourné parmi nous quelque jours. Nous avons bien essayé de vous aider et tenté d'arriver à comprendre ce que vous viviez, trouver d'où vous nous arriviez ainsi, mais sans succès...Puis un bon matin, nous ne vous avons plus trouvée nulle part. Vous aviez disparu, envolée! Jusqu'à ce que je vous soyez de retour, aussi mal en point, il y a quatre jours.

- C'est dément cette histoire... J'ai perdu la tête, pété les plombs, ou quoi?... je veux comprendre.

- Alors il semble que nous allons pouvoir essayer de faire la lumière sur votre situation. Mais vous allez d'abord reprendre encore des forces, bien manger, aller prendre l'air, faire un peu d'exercice et prendre du repos. Dans deux ou trois jours nous reparlerons encore et nous verrons ce que nous pourrons trouver.

[Evolutia]

-
Entre les bons repas, l'exercice et le repos, je me sens mieux; ce sont les longues ballades dans le grand jardin qui m'ont le plus revigorée. Me voilà un peu plus lucide et ce que j'aimerais le plus au monde c'est de recouvrer la mémoire. Je veux savoir qui je suis, retrouver mon identité.

Qu'est ce qu'était ma vie avant mon premier séjour ici? Qu'ai-je vécu entre les deux? Qu'est ce qui a bien pu m'amener ici la première fois? Comment se fait-il que je sois partie en disparaissant sans crier gare et que me voilà revenue?... Vais-je arriver à retrouver mon bagage, faire du sens de toute cette confusion?

Là, je peux réfléchir calmement sans être aux prises avec ces terribles migraines...
Je n'ai plus peur d'être à l'asile et j'ai compris que Dame Isabeau veut sincèrement m'aider.

Je me rends à mon rendez-vous avec elle. Je la rejoins dans un gazebo près de la source, au fond du jardin. Je m'assied sur un banc, face à elle, autour d'une table bancale à la surface un peu rude et nous entamons la conversation que je commence en posant ma première question.

- Parlez-moi de mon arrivée la première fois?

- Je vous demande, s'il vous plaît, de me faire confiance et de suivre mes conseils, d'accord?

__ --- __

- D'accord.

- Nous allons d'abord tâcher de nous concentrer sur votre mémoire à court terme. En commençant par votre arrivée il y a une semaine, voyons ce que nous pourrons découvrir. Commencez à boire de cette tisane que je vais vous servir, par petites gorgées. Laissez vous aller au calme. Votre nom est bien Evolutia? Et depuis que vous vous sentez mieux, à quoi pensez-vous ces jours-ci, qui vous revient en mémoire, des souvenirs vous reviennent-ils?

- Oui, je m'appelle Evolutia...

Je pense à, je me souviens, d'horribles cauchemars venant hanter mes nuits, perturber mon sommeil et de fort douloureuses migraines à chaque fois que j'essayais de faire appel à ma mémoire. Mais là ça va, il me semble que je peux réfléchir sans risques.

- Bien, alors détendez vous et fermez les yeux. Prenez de grandes respirations et concentrez vous sur votre souflle. Vous êtes Evolutia, vous êtes en Kiponie, où habitez vous? Qu'est-ce que vous faites?

- L... Lep... Lapiaz! J'habite à Lapiaz, J'ai une cabane, bâtie récemment, je travaille... Je vais à la pêche?... Oui! Et je suis surprise de me rendre compte que je sais y faire. Je me demande d'où me vient ce talent. Je suis entourée de quelques amis, qui sont-ils, elles?... Je ne sais pas là...

)*( FLASH!!! )*(

- Pendant un certain moment je me suis sentie inspirée, soulevée par une grande poussée d'enthousiasme et tout d'un coup je voulais tout faire en même temps, je me sentais une énergie géante pour tout entreprendre... Un autre terrible cauchemar durant la nuit, ma tête qui veut éclater, je sors en courant prendre l'air... Je me suis réveillée ici... Oh! ça tourne, je me sens étourdie!

- Concentrez vous sur le son de ma voix et ne pensez plus à rien, lâchez prise, c'est assez pour le moment. Nous pourrons probablement entreprendre une autre séance demain. Prenez soin de vous ménager, il ne faut rien précipiter, ne pas vous brusquer surtout, si vous voulez redevenir saine d'esprit.

Il m'est venu un flash spontané, j'ai tout déblatéré d'une traite à une vitesse surprenante.
Oui, une porte s'est entrouverte, le blocage cède, je sens poindre l'espoir d'y arriver.

[Evolutia]

-
Dame Isabeau m'aida au fil des séances de libération, à faire face aux peurs qui se dissipèrent et à maîtriser mes émotions. J'arrivais peu à peu à rassembler et à recoller des morceaux de mon court séjour à Lapiaz. Il me restait cependant encore des mystères à élucider.

Je n'arrivais pas à savoir dans quelles circonstances j'étais venue me réfugier à l'asile une première fois, ni comment je m'étais ensuite volatilisée pour me retrouver étendue dans une prairie aux abords de Lapiaz, surtout sans m'en rendre compte. Et comment se faisait-il que je me sentais novice en Kiponie, en train de débuter une nouvelle vie, puisque qu'il apparaissait que j'avais un vécu sur le territoire avant que tout cela ne se produise.

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Au cours d'une de nos longues conversations Isabeau me dit :

- Les cas d'amnésie en Kiponie sont monnaie courante. Presque tous les naufragés qui viennent s'échouer sur les plages oublient leur passé, soit par un choc immédiat ou alors il ne leur reste que quelques bribes qui s'évanouissent avec le temps. Parfois certains d'entre eux oublient même ce qui leur est arrivé juste avant leur réveil sur le sable des côtes. Une bataille mentale comme celle que vous avez traversée est un phénomène rare et extraordinaire.

- Eh bien, c'est sur le dos au milieu de la verdure, sur la terre sèche, que mon aventure à Lapiaz a commencé... Oui, je sais, il y a un "avant"...

Je bois la tasse de sa tisane curative. Elle me demande de lui raconter mes mauvais rêves, encore une fois.

Je m'adosse et me sens ramollir, je ferme les yeux, les images reviennent...

- Je suis dans une barque au milieu des marais salants de "lagonie", je suis en train de m' empêtrer avec un filet de pêche que j'ai arrimé aux crochets du bastingage. Je porte une panoplie de bijoux, plusieurs pelures de tuniques... Le filet m'échappe, l'eau est sur le point de s'infiltrer dans la barque parce que je suis trop penchée vers l'avant. Le filet se déroule de plus en plus vite et comme je ne le contrôle pas, lorsqu'il arrive au bout du rouleau un coup de boutoir renverse l'embarcation. Je tombe à l'eau et je suis trop lourde, je coule à pic, puis... plus rien...

Celui-là, c'est mon premier cauchemar.

- Vous me décrivez les circonstances. Pendant qu'il vous semble les vivre, comment vous sentez-vous, à quoi pensez-vous? Repassez les images et dites-moi ce que vous ressentez.

- Euh... J'ai... Je porte toutes ces pelures, même une tunique pour l'hiver... Je... j'ai froid malgré la chaleur et l'humidité. Je me sens engourdie, l'esprit dans le cirage... mais... plus loin, une lourde tristesse... Je me sens blasée, lasse... Euh... Écoeurée de la vie...

Vous tremblez maintenant et vous pleurez... Qu'y a t-il?

- J'ai tenté d'en finir...


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Parlez-moi de mon arrivée la première fois?

[Evolutia]

-
Isabeau commence par me regarder droit dans les yeux, puis se met à raconter.

- Vous êtes arrivée dans un état de semi-conscience frôlant la transe. Je me suis vraiment demandé comment vous aviez eû la force de vous rendre jusqu'ici et de crier pour du secours. Les tuniques que vous portiez en surcouches étaient collées d'une glue poisseuse répandant une puanteur de fonds vaseux. Vous étiez en bien piteux état.

Je devais d'abord commencer par stabiliser votre état, par calmer votre peur, vous étiez terrorisée en pensant à l'asile... Il me fallait arriver à vous inspirer un minimum de confiance en moi, davantage par des gestes que des paroles. Je devais attendre d'être capable de vous parler, mais vous avez mystérieusement disparu avant que je n'aie pu le faire.

Les marais se trouvent à proximité de cette prorpriété et l'odeur qui flottait autour de vous ne laissait pas de doute sur leur provenance. J'ai dépêché Séverin, accompagné du jardinier pour aller enquêter. Ils ont bien vu des traces sur le sable, comme si vous vous étiez traînée hors de l'eau, quelques billes de colliers cassés et dans l'eau au bord de la rive, une amulette et une bague... Ils ont aussi vu d'autres traces de pas que les vôtres, mais ces indices ne nous ont par la suite livré aucunes réponses.

Je peux vous montrer ces bijoux que j'ai conservés, si vous le voulez.

- Oui, je veux bien. montrez-les moi

Je prends l'amulette et la bague, les retourne entre mes doigts, les regarde attentivement. Je me sens étreinte par l'émotion, mais je ne sais pas pourquoi. Ma mémoire est encore chancelante.

- Ils sont à moi, évidemment... Mais je ne sais pas encore ce qu'ils me rappellent.

- Ça peut prendre plus de temps, il est préférable d'être patiente.

Physiquement vous avez changé aussi. Votre regard brille d'une lueur différente, d'un air méfiant et parfois colérique. Vos cheveux sont plus courts bien que toujours de la même couleur et vous ne portiez pas cette mèche rose vous retombant sur le front, lorsque vous êtes venue la première fois.

- Veuillez m'excuser, je vais aller dormir je suis fatiguée...

- Mais oui, allez vous reposer. Je vous souhaite un sommeil réparateur.

Cette nuit là il n'y eut pas de rêves, seulement des pensées manifestées sous forme de songes.

[Evolutia]

Séverin courut jusqu'à la porte de la chambre de dame Isabeau et cogna assez fort pour s'assurer qu'elle lui répondrait rapidement. En effectuant sa ronde de nuit il avait entendu une voix marmonner et en allant vérifier d'où cela provenait il avait vu, par la porte entrouverte de sa chambre, Evolutia qui parlait dans son sommeil les bras gesticulant dans les airs. Le petit homme avait peur de ce genre de démonstrations de "folie"... Il tenait donc à ce que sa maîtresse intervienne le plus rapidement possible.


Isabeau alertée s'en fut presque en courant au chevet de sa protégée. Rendue auprès d'elle , elle commença par lui prendre les mains pour arriver à les masser par des gestes circulaires avec ses pouces, ce qui eut pour effet de calmer Evolutia qui se laissa déposer les bras de chaque côté du corps. Elle lui toucha ensuite précautionneusement le front et les joues.

"Elle fait de la fièvre"...

Tournant les talons elle se rendit en hâte à l'infirmerie et revint presque aussitôt avec de l'eau la plus froide possible, des linges et quelques herbes médicinales. Tout en épongeant le front d'Evolutia elle commença à l'appeler, presque en chuchotant, afin d'arriver à la tirer de son sommeil le plus doucement possible. Au bout d'un instant la malade ouvrit les yeux et se mit à murmurer, puis à parler de façon plus audible. Dame Isabeau prit place à côté d'elle au bord du lit.


Je... Je me souviens maintenant...

Ma précieuse amulette, dont j'avais fait l'acquisition dès mon arrivée sur le territoire, à K... Koryndon ! La bague... d'heureuses fiançailles... Pour une, des, raison(s), que j'ignore je me suis retrouvée dans cette barque avec les quelques possessions qui me restaient. Le coeur si lourd... Tuniques, bijoux... Mon manoir, mon atelier, ma prairie... tous mes biens. liquidés. Je voulais sombrer dans le marais, disparaître. Comment ai-je pu en sortir et me rendre jusqu'ici, en mode survie ??? ... Je ne garde aucun souvenir de ce premier séjour, ni de comment je suis repartie pour ensuite me réveiller étendue dans la prairie à Lapiaz.

La tête me fait mal, j'ai le bourdon...


Je ne saurais non plus vous dire... Un matin, comme vous tardiez à vous présenter, je suis allée voir à votre chambre et vous n'y étiez pas. Après vérification partout et le soir venu ne vous voyant revenir, nous avons du nous rendre à l'évidence que vous vous étiez envolée. Lorsque je vous ai vue revenir quelques mois plus tard sous votre nouvelle apparence j'ai compris pourquoi nos avis de recherches sur le territoire n'avaient donné aucunes réponses.

Vous restiez introuvable, mystérieusement disparue...


Vous saviez... Vous savez qui je suis.

Je suis Dame Gibozel de Quebnada, je suis Gibozel... si lasse et malheureuse...

Mais... Comment je suis partie, comment j'ai changé de look, d'identité, et suis devenue Evolutia ??? ...

Oh... ma tête ! j'ai mal !


Oui, je sais qui vous êtes. Le plus important en ce moment c'est que vous êtes toujours en vie et que vous arrivez à recouvrer la mémoire. Mieux vaut cesser de forcer à vouloir vous souvenir trop fort. Tenez, mâchez bien ces quelques herbes douces. La douleur va se calmer et vous pourrez vous rendormir. Nous allons devoir vous donner temps et repos avant de pouvoir continuer le traitement vous aidant à reconstituer votre histoire. Voilà, étendez-vous confortablement et dormez bien. Je vais rester avec vous quelques minutes. Par la suite je reviendrai vers le petit matin pour vous donner encore une portion d'herbes.


Isabeau prit la main de sa patiente dans la sienne et attendit qu'elle se rendorme. Voyant qu'elle reposait paisiblement elle partit faire elle-même une ronde de surveillance dans cette aile du complexe psychiatrique, passa prendre d'autres herbes et revint prendre soin d'E... de Dame Gibozel. L'aurore commençait à diffuser sa lumière par la fenêtre. Elle se rendit près du lit, toucha le front, l'épaule...


Une heure plus tard, assise à son bureau, Dame Isabeau écrivait sur un grand parchemin :

À l'asile du Territoire de Kiponie et souffrant d'une maladie inconnue, en ce ..., s'est éteinte Dame Gibozel de Quebnada.

La défunte ne laisse aucuns descendants dans le deuil, aucun testament, biens, héritage.

Revêtue d'une blanche tunique, le cou orné de son amulette et sa seule bague au doigt, elle sera mise en terre près de la fontaine où elle aimait aller se reposer. Un monument sculpté à son effigie sera posé sur sa tombe. Un rosier y sera planté.

Elle laissa échapper un long soupir, écrasant une larme.


"Y aura-t-il seulement quelqu'un pour la regretter, pleurer sa mort"...